Depuis l’invention de l’imprimerie, l’édition a connu de nombreuses évolutions et révolutions. En 2013, on pensait que l’arrivée du livre numérique changerait la donne du marché de l’édition et de la lecture. Dix ans plus tard, le livre papier possède toujours la majorité des parts de marché. En revanche, le numérique a ouvert les portes de l’édition à de nombreux auteurs qui ont pu s’auto-éditer, non seulement en ebook, mais aussi en papier grâce à l’impression à la demande. Mais les révolutions sont toujours en marche : après l’essor du livre audio depuis quatre ou cinq ans, c’est maintenant l’intelligence artificielle qui agite le monde éditorial. En quelques titres:La révolution du livre numérique n’a pas eu lieuL’auto-édition : tous auteurs ?L’impression à la demande (POD)Le livre audio, un nouveau format en plein essorL’intelligence artificielle ou l’édition 3.0La révolution du livre numérique n’a pas eu lieu Le livre numérique ou ebook est récent au regard de l’histoire du livre imprimé et son demi-millénaire, il est quand même plus vieux que ce que l’on pense. Le premier livre numérique a été créé en 1971 : l’eText du Projet Gutenberg lancé par un certain Michael Hart. La version commerciale de l’ebook voit le jour en 1998, mais il s’envole véritablement à partir des années 2000 avec la création du format mobipocket puis du PDF en 2001. La première liseuse Kindle est vendue en 2007, mais l’essor des liseuses s’observe à partir de 2012. Cependant, seulement un tiers des lecteurs lisent sur support numérique. À cette époque, les craintes étaient nombreuses quant à l’avenir du livre papier. On prédisait l’avènement du zéro papier et la remise en cause de toute la chaîne du livre, depuis les imprimeurs jusqu’aux diffuseurs et distributeurs. Mais le pavé a fait de la résistance : en 2021, la part des ventes numériques dans le chiffre d’affaires total des éditeurs n’est que 9,32 %, dont la majorité est représentée par les livres professionnels, scolaires et universitaires (source baromètre du Syndicat national de l’édition). Pour ce qui est de la fiction, le livre papier est encore largement représenté. A lire aussi : Cinq idées reçues sur le livre numérique L’auto-édition : tous auteurs ? Mais le numérique ouvre bien plus de portes que la simple accessibilité des œuvres sur un ordinateur, un smartphone ou une liseuse. En effet, la possibilité de s’affranchir des coûts d’édition papier permet à n’importe qui de pouvoir diffuser son texte sous format numérique, à moindre coût et en direction d’un large public. Amazon est créé en 1995 et est aujourd’hui la première librairie numérique du monde. L’entreprise a révolutionné les circuits de distribution des livres, quel que soit leur format. Le numérique autorise aussi la publication sur Internet, via des plateformes spécialisées comme Wattpad ou Fyctia, au concept hérité des feuilletons du XIXe siècle publiés par épisodes dans les journaux quotidiens. L’auteur débutant ou plus confirmé peut ainsi être lu et trouver son public de lecteurs sans passer par une maison d’édition. A lire aussi : Autoédition : choisir sa formule en fonction de ses besoins L’impression à la demande (POD) Le numérique a bouleversé la fabrication même du livre papier avec l’arrivée de l’impression à la demande ou POD (print on demand). Jusqu’à présent, les éditeurs imprimaient des stocks de livres destinés à être envoyés aux librairies et points de vente pour être mis à disposition des lecteurs. L’estimation du tirage moyen pouvait parfois être difficile et la mise au pilon (destruction) des invendus fréquente. Les machines numériques permettent d’imprimer rapidement et surtout à faible coût des petites quantités d’exemplaires, contrairement aux imprimantes offset aux coûts fixes rédhibitoires sur des petits volumes (moins de 100 exemplaires). Parallèlement au livre numérique, l’impression à la demande favorise l’essor de l’autoédition et permet aux auteurs d’imprimer des livres au format papier sans passer par une maison d’édition. A lire aussi : Impression à la demande, comment ça marche ? Les éditeurs eux-mêmes se saisissent de l’impression à la demande pour optimiser leurs coûts de production. En 2016, la maison d’édition Humensis installe dans sa librairie parisienne une imprimante Xerox capable d’imprimer en quelques minutes un livre complet. Si le prix de revient d’un livre imprimé à la demande reste cher, il est compensé par les économies sur le stockage et le transport. Aujourd’hui, de nombreux éditeurs poursuivent l’exploitation de leurs collections après le premier ou le second tirage grâce à l’impression numérique. Le livre audio, un nouveau format en plein essor Si le livre numérique a peiné à trouver son public, le livre audio a par contre connu une croissance exponentielle. En 2021, le marché mondial représentait plus de 4 milliards de dollars et devrait dépasser les 15 milliards de dollars en 2027 selon Grand View Research. En France, le marché représente déjà près de 100 millions d’euros et le livre audio n’est aujourd’hui plus un marché de niche : un Français sur cinq est adepte de ce format. Le modèle de consommation du livre audio, sous forme d’abonnement avec un crédit d’heures comme pour les plateformes d’écoute de musique en ligne, a largement favorisé l’essor de l’audiobook. Avec le développement des smartphones et des podcasts, le livre audio est devenu accessible et ne nécessite pas l’achat d’un autre support comme pour l’ebook. On peut l’écouter partout, y compris en faisant autre chose, ce qui explique son succès. Les prochaines innovations portent sur l’utilisation de voix de synthèse afin de réduire les coûts de production des audiobook. L’intelligence artificielle ou l’édition 3.0 Les algorithmes gérés par l’intelligence artificielle ou IA sont déjà fortement présents dans le secteur du livre. Les librairies en ligne les utilisent par exemple pour conseiller des livres adaptés à vos goûts et en fonction de votre historique d’achat ou de consultation. Mais l’IA s’infiltre peu à peu dans toute la chaîne du livre, jusqu’à la source : l’auteur. Le premier bouleversement concerne la traduction des ouvrages, selon Virginie Clayssen, présidente de la commission numérique du SNE. Les technologies d’apprentissage de l’IA permettent de multiplier les versions linguistiques à moindre coût. L’IA facilite également la conversion d’un manuscrit en différents formats, de l’ebook à l’audio en passant par le broché. La plus grosse inquiétude concernant l’IA provient des auteurs : la génération de livres de fiction ou de non-fiction par une intelligence artificielle remet en cause l’acte de création littéraire même. Mais l’IA est surtout présente dans les outils d’aide à l’écriture (correcteur orthographique par exemple) et d’assistance. A lire aussi : L’intelligence artificielle va-t-elle remplacer les auteurs ? Par exemple, le logiciel Granthika créé par l’écrivain Vikram Chandra de cartographier les éléments narratifs de son manuscrit en cours d’écriture pour s’y retrouver plus facilement. D’autres auteurs retravaillent des premiers jets générés par l’IA et y apportent leur patte. Pour l’heure, « l’intelligence artificielle relève davantage de l’intelligence augmentée que de la conscience artificielle » comme le souligne le livre blanc L’intelligence artificielle et le monde du livre publié par deux chercheurs québécois en 2020. En 10 ans, l’édition a connu bien des évolutions, dont la plupart sont liées à l’émergence du numérique. Nul doute que les années à venir auront aussi leur part d’innovations et de révolutions, notamment avec l’intelligence artificielle qui en encore à ses prémices ! Pour aller plus loin : Comment créer la couverture de son livre avec l’intelligence artificielle ? Impression à la demande : quels avantages pour les auteurs ? Comment vendre votre livre sur Amazon avec succès ?